Le café ralentit le déclin cognitif non pathologique lié à l’âge : l’essentiel des études

La caféine, de par ses effets sur la vigilance, l’apprentissage et l’attention, pourrait avoir des actions positives contre le déclin cognitif lié à l’âge. Voici une synthèse des études sur le sujet.

Le vieillissement cognitif

Les fonctions cognitives comme le temps de réaction, la vitesse de perception et de traitement des informations restent stables entre 20 et 60 ans et subissent un ralentissement entre 60 et 80 ans. Toutefois la vitesse et l’amplitude du déclin cognitif varient en fonction des individus. Certains évènements comme les maladies (en particulier vasculaires), le stress oxydatif et l’inflammation, les facteurs génétiques, le style de vie (absence d’exercice et tabagisme), la nutrition (régime riche en lipides totaux et acides gras saturés) et les carences subcliniques du sujet âgé ont été associés à un déclin cognitif accéléré. Ces éléments conduisent à penser que le déclin cognitif est, au moins en partie, modifiable.

Différentes pistes ont été explorées, comme l’activité physique et l’équilibre alimentaire, et des stratégies de supplémentation en antioxydants, en vitamines, en Ginkgo biloba et en ginseng. Les effets du café ont également été étudiés sur le déclin cognitif avec pour rationnel les actions de la caféine sur la vigilance, l’apprentissage et l’attention.

Les effets du café chez le sujet âgé

Pour la majorité des individus, les effets stimulants de la caféine sont indépendants de l’âge et concernent l’attention, l’apprentissage, la mémoire.

Toutefois, les sujets âgés sont souvent plus sensibles aux effets de la caféine que les sujets jeunes, en particulier dans le maintien de la performance sur la durée (1, 2). Une étude comparant des sujets jeunes (18-37 ans) et âgés (60-75 ans) recevant 225 mg de caféine, soit l’équivalent de 2 grandes tasses de café montre que la caféine améliore la performance dans les tâches simples chez le sujet jeune et, à l’inverse, dans le traitement des tâches complexes nécessitant une attention soutenue chez le sujet âgé (tâches souvent plus perturbées dans cette population).

Ces résultats confirment l’hypothèse selon laquelle la caféine permettrait d’augmenter les ressources disponibles chez les sujets âgés (3).

 

Sur le long terme : études sur de larges cohortes

Les études rétrospectives de population ont montré une association positive entre les fonctions cognitives et la consommation habituelle de café/caféine.

  • Une étude britannique portant sur 9 003 sujets rapporte des effets positifs dose-dépendants du café sur les fonctions cognitives (temps de réaction, mémoire verbale et raisonnement visio-spatial) plus marqués chez les hommes et les femmes les plus âgés (4).
  • Au contraire, les études néerlandaises portant sur 1 875 et 1 376 sujets âgés de 24 à 81 ans ont rapporté des effets positifs de la caféine provenant du café et du thé sur le temps de réaction et la mémoire verbale, mais indépendants de l’âge (5, 6).
  • Enfin, dans l’étude californienne Rancho-Bernardo incluant 890 femmes et 638 hommes bien portants âgés de 73 ans en moyenne, la consommation de café plus élevée au cours de la vie est associée chez les femmes à une meilleure performance dans 6/12 tests et la performance est significativement meilleure dans 11/12 tests chez les femmes de plus de 80 ans. Aucun effet n’a été observé chez les hommes et le café décaféiné est lui aussi sans effet (7).

Ces études rétrospectives soutiennent la notion que la consommation habituelle de café et de caféine pourrait augmenter la réserve cognitive des sujets.

  • Dans l’étude prospective française des « Trois villes », incluant 4 197 femmes et 2 820 hommes bien portants de plus de 65 ans, les femmes consommant plus de 3 tasses de café par jour pendant 4 ans ont vu un effet préventif sur leur déclin cognitif au niveau de la restitution de mots et de la mémoire visio-spatiale comparé aux femmes consommant une tasse ou moins. Cet effet de la caféine s’accroît avec l’âge et atteint un maximum après 80 ans. Aucune relation n’a été observée entre la consommation de café et le déclin cognitif chez les hommes (8).
  • L’étude prospective récente FINE, portant sur 676 hommes en bonne santé nés entre 1900 et 1920 (Finlande, Italie et Pays-Bas) montre un déclin cognitif moyen de 4 % sur 10 ans chez les consommateurs de café. Les non consommateurs ont un déclin additionnel de 4,7 %. Les effets du café dépendent de la dose avec le déclin le plus faible pour 3 tasses de café quotidiennes, 2 % (9).
  • Une étude finlandaise récente portant sur 2 606 jumeaux suivis sur une moyenne de 28 ans ne montre pas d’effet indépendant du café dans la pathogenèse du déclin cognitif (10).
  • Finalement, une étude de cohorte écossaise a inclus 923 adultes en bonne santé de la Lothian Birth Control 1936 Study dans laquelle le QI des enfants a été mesuré à 11 ans. La fonction cognitive a été testée à 70 ans. Les auteurs ont trouvé une association positive entre la prise de caféine (café, thé, et caféine totale), les fonctions cognitives et la mémoire indépendamment du sexe. Ils ont également montré que QI de l’enfant et la classe sociale étaient liés aux fonctions cognitives chez la personne âgée (10).

Pour conclure

La consommation de café et de caféine agirait sur les composantes du déclin cognitif lié à l’âge. Il reste toutefois à clarifier pourquoi certaines études n’ont pas observé d’effet ou seulement pour un sexe et de mieux définir la nature de l’association entre la consommation de café et la prévention potentielle du déclin cognitif lié à l’âge. Les substances actives autres que la caféine présentes dans le café n’ont pas toutes été identifiées ni étudiées et leurs mécanismes d’action n’ont pas été élucidés.


L’actualité scientifique sur le café. Newsletter n° 1 – juin-juillet 2010

Pour en savoir plus :

1. Swift CG, Tiplady B. The effects of age on the response to caffeine. Psychopharmacology 1988 ; 94 : 29-31.
2. Rees K et al. The influences of age and caffeine on psychomotor and cognitive function. Psychopharmacology 1999 ; 145 : 181-8.
3. Lorist MM et al. Aging, caffeine, and information processing: an event-related potential analysis. EEG Clin Neurophysiol 1995 ; 96 : 453-67.
4. Jarvis MJ. Does caffeine intake enhance absolute levels of cognitive performance? Psychopharmacology 1993 ; 110 : 45-52.
5. Hameleers PA et al. Habitual caffeine consumption and its relation to memory, attention, planning capacity and psychomotor performance across multiple age groups. Hum Psychopharmacol 2000; 15 : 573-81.
6. van Hooren SA et al. Influence of cognitive functioning on functional status in an older population: 3- and 6-year follow-up of the Maastricht Aging Study. Int J Geriatr Psychiatry 2005 ; 20 : 883-8.
7. Johnson-Kozlow M et al. Coffee consumption and cognitive function among older adults. Am J Epidemiol 2002 ; 156 : 842-50.
8. Ritchie K et al. The neuroprotective effects of caffeine: a prospective population study (the Three City Study). Neurology 2007 ; 69 : 536-45.
9. van Gelder BM et al. Coffee consumption is inversely associated with cognitive decline in elderly European men: the FINE Study. Eur J Clin Nutr 2007 ; 61 : 226-32.
10. Laitala VS, et al. Coffee drinking in middle age is not associated with cognitive performance in old age. Am J Clin Nutr. 2009 ;90 : 640-6.
11. Corley J et al. Caffeine Consumption and Cognitive Function at Age 70: The Lothian Birth Cohort 1936 Study. Psychosom Med 2010 ; 72 : 206-14.